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Revue de presse

Table ronde : Comment faire d’un sujet local une actualité nationale ?

By 23 novembre 2010janvier 13th, 2021No Comments

Cette table ronde organisée par Reporters d’Espoirs et la Sncf à l’occasion de la remise des prix du concours « Information et territoires », était animée par Jacques Trentesaux, rédacteur en chef adjoint à l’Express, service régions

Avec :
Lucie Montchovi, journaliste à France Info, responsable de la rubrique « initiatives »
Jean-Jacques Basier, chef du service enquêtes et reportages de France 3
Frédéric Karpyta, chef du service société au magazine Ça m’intéresse
Alain Piffaretti, rédacteur en chef de la Gazette des Communes
Claire Moreau-Shirbon, rédactrice en chef des journaux d’Amiens Métropole
Jean-François Lanneluc, directeur général adjoint en charge de la communication à la mairie de Strasbourg
et François Goudenove, directeur de la coopérative Websourd

Tous les intervenants de la table ronde partagent le même constat, celui d’une certaine incompréhension entre les journalistes nationaux et les responsables de communication des collectivités. Alors que ces professionnels devraient logiquement collaborer et se compléter, la distance, voire la méfiance priment. Mais aux antipodes du fatalisme, cette discussion entre journalistes et responsables de communication territoriale a permis de faire émerger des pistes pour surmonter le problème.

« La presse nationale française est parisianiste » : les journalistes eux-mêmes le reconnaissent, ils ont une tendance à privilégier l’actualité parisienne. Jacques Trentesaux admet volontiers que les jeux politiques par exemple bénéficient d’une priorité par rapport aux initiatives locales. Les contraintes matérielles facilitent également les reportages en Ile de France, comme le rappelle François Goudenove. Mais selon Alain Piffaretti, la raison de la myopie des médias parisiens est plus profonde : « Les journalistes pensent encore comme il y a 25 ans, ils n’ont pas pris la mesure de la décentralisation. Aujourd’hui l’Etat n’a plus d’argent pour initier les projets. Les collectivités locales représentent 70% de l’investissement public et influent énormément sur le quotidien des gens. »

Les journalistes doivent évoluer et s’intéresser davantage à l’actualité des régions, mais les chargés de communication des collectivités ont également un grand rôle à jouer pour leur faciliter le travail. Frédéric Karpyta peut en témoigner : « Je reçois des centaines d’emails des services de communication pour me donner des informations qui ne m’intéressent pas. Le lancement de l’agenda 21 d’une commune, c’est purement institutionnel, il n’y a rien d’innovant. »

Il n’est pas facile de sélectionner les infos locales dignes d’être relayées à l’échelon national. Jean-Jacques Basier donne quelques clés de succès : « Pour qu’une info locale soit reprise, il faut absolument qu’elle soit innovante, et qu’elle soit dans l’actualité. Quand Nicolas Sarkozy lance un grand chantier sur la dépendance, c’est le moment de faire remonter les initiatives sur ce sujet, car les journalistes ont besoin d’en parler. »

Jacques Trentesaux va même plus loin : « Il  faut anticiper sur l’actualité, surtout avec les hebdomadaires et les mensuels, qui bouclent très en amont leurs dossiers ».

Comment faire d’un sujet local une actualité nationale ? Partie 1

Une fois qu’on a repéré l’info qui fera mouche, encore faut-il savoir la mettre en forme. A ce titre, les conseils de Jean-François Lanneluc valent de l’or : « Il faut mettre en avant l’aspérité de votre sujet, ce qui le différencie des autres. Et il faut aller droit au fait, dès la première ligne de votre communiqué ! Ça  ne sert à rien de resituer dans le contexte de la politique générale de la collectivité, car vous délayez l’info dans la littérature et vous lâchez votre lecteur. »

Autre conseil avisé, repris par plusieurs intervenants : il est important de connaître personnellement les journalistes qui couvrent une région ou une rubrique spécialisée et d’établir avec eux, à froid, des liens qui pourront s’avérer utiles quand viendra le moment de pousser une information. Mais à ce moment là, il ne faut pas se contenter d’envoyer juste un mail, selon Jean-Jacques Basier : « Je vous conseille le harcèlement : il faut appeler et rappeler jusqu’à ce qu’on vous réponde ! »

Autre précision utile aux services de communication : selon Jacques Trentesaux « les journalistes réagissent très mal quand ils ont l’impression qu’on leur demande de faire de la publicité pour un élu local. Mais quand un journaliste parle d’un projet, il a besoin d’interroger une personne responsable. Donc vous avez tout intérêt à mettre plutôt en avant le projet lui-même, car la plupart du temps, si le projet intéresse le journaliste, ce sera l’occasion de faire s’exprimer le responsable politique. »

Comment faire d’un sujet local une actualité nationale ? Partie 2

Lucie Montchovi s’étonne cependant de ne jamais être contactée par des journalistes de presse locale pour lui faire remonter des informations. Réponse de Claire Moreau-Shirbon : « Quand vous travaillez dans un journal local, en fait vous n’avez pas besoin de faire remonter des informations au niveau national. Tant que les résidents de votre région ont l’information, ils sont satisfaits.»

Au contraire, Jean-François Lanneluc explique, en s’appuyant sur son expérience, que faire passer l’information dans les médias nationaux peut être un formidable appui pour une collectivité : «Quand Strasbourg a lancé son tramway, ça a été assez difficile à faire accepter aux habitants. Les journaux des collectivités vantaient l’innovation, et les journaux locaux relayaient les polémiques, mais on n’arrivait pas à faire tout à fait consensus. C’est au moment où la presse et la télévision nationales ont commencé à en parler que le consensus populaire s’est fait en faveur du tramway.» D’où l’intérêt que les journaux locaux et les services de communication travaillent en étroite coordination, pour repérer les initiatives locales pertinentes et les relayer à plus grande échelle.

A l’issue de cette table ronde très animée où les différents points de vue se sont complétés, chacun a pu repartir avec une conviction : il est essentiel de se connaître mutuellement et d’intégrer les contraintes respectives des uns et des autres.

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